La semaine dernière a été une semaine de "lycée à la maison". Au moment où les discours officiels commentent les réussites et les problèmes rencontrés, récit de l'intérieur de cette semaine très bizarre...
A Marseille, on utilise l'ENT régional Atrium. Suite à l'annonce du re-re-confinement, vendredi 02/04 et pendant le week-end qui suit (lundi férié), les équipes du lycée s'activent pour préparer un minimum les choses. On crée des salles de visio, de petits sites pour centraliser les documents et les liens à destination des élèves, surtout on fait des emplois du temps compatibles avec les différentes classes de chaque enseignant...
Mardi matin : Départ en fanfare : Atrium est hors service, les serveurs de visio BigBlueButton de l'Académie d'Aix-Marseille ne fonctionnent pas ! Il y a bien Pronote (logiciel utilisé pour les notes, les absences et le cahier de texte), que je pense en dernier recours pouvoir utiliser... Las : l'identification se fait via un CAS hébergé par Atrium : celui-ci dysfonctionnant, je ne peux même pas accéder à Pronote ! Je m'aperçois que je n'ai jamais imprimé les numéros de téléphone de mes élèves cette année : impossible de les joindre.
Mercredi matin : Atrium fonctionne, mais mal, les serveurs de visio BigBlueButton sont toujours injoignables. Plus précisément, ils redirigent maintenant vers les classes virtuelles du CNED (la redirection a été mise en place sans préavis ni explication). Mais pour utiliser ces classes, il faut que les élèves se soient créé un compte, ce qui signifie quelques difficultés si cette tâche n'a pas été réalisée en amont. J'essaye de me connecter avec mon identifiant CNED, mais le serveur ne répond pas. J'ai une visio prévue avec une classe de première que j'avais déjà l'année dernière, au moment du premier confinement. Bien que ce soit interdit officiellement par l'institution (pour protéger les données personnelles des élèves et pour respecter la RGPD), je décide de réutiliser le serveur Discord déjà utilisé l'an dernier. Difficulté pour envoyer l'invitation Discord aux élèves : au bout de 10 minutes, le mail Atrium contenant le lien n'a toujours pas pu s'envoyer. Une élève qui s'inquiétait m'a adressé un mail avec son numéro de téléphone portable personnel. Je finis par lui envoyer le lien par SMS, elle fait suivre aux autres et les élèves commencent à arriver sur Discord. Encore une dizaine de minutes et une bonne partie de la classe est là. On peut enfin travailler un peu ! Les élèves vont bien mais l'ambiance est à la rigolade, difficile de les concentrer. Je ne fais pas l'appel, vu les conditions. Je file ensuite préparer un DM Wims : au moins c'est un service qui est fiable, efficace et que mes élèves ont l'habitude d'utiliser !
Jeudi matin : Les visio BigBlueButton sont toujours down et renvoient vers les classes CNED. J'ai une visio prévue avec des BTS. La professeure principale de la classe me recommande sa classe CNED en me disant que ça fonctionne... sauf que à 10h, ça ne fonctionne pas. C'est également une classe pour laquelle un serveur Discord est fonctionnel depuis l'an dernier : nous passons sur Discord. Les étudiants de BTS sont persuadés que leurs examens en CCF n'auront pas lieu (ils étaient programmés à des dates qui tombent maintenant pendant les vacances). Je vois certains étudiants jouer à des jeux en ligne en même temps que la visio de maths (c'est la magie de Discord :-) Bref, on fait un peu semblant de faire cours, c'est à dire que je résous un exercice de révision pour les CCF, mais eux : je ne sais pas bien ce qu'ils font !
Les séances du vendredi après-midi feront l'objet d'un autre post car c'était de la SNT.
Mais avant de finir, il faut évoquer les réactions de certains politiques après cette semaine de folie : M. Blanquier accuse les collectivités territoriales « De fait, les collectivités territoriales et les opérateurs n’ont pas su faire face à l’afflux, j’espère qu’ils vont trouver une solution dans la journée. » (Bon moi, je croyais que le CNED, entre autre, c'était national... mais M. Blanquier ne veut plus grand chose de national...)
Les collectivités en question semblaient être sur une autre planète : « en ce qui concerne les lycées, tous les professeurs ont pu travailler à distance. Donc chez moi, aucun bug » dixit le grand commandant régional local ?!
On voit bien que ces politiques ne sont pas très favorables à la dépense publique (en fait, ça dépend laquelle !) mais quand même, ce ne serait peut-être pas du luxe qu'il y ait quelques serveurs de plus à l'Education Nationale ? Et quelques informaticiens ?
Personnellement, cette semaine de débacle pile un an après le premier confinement, ça m'a travaillé un bon moment, entre colère et démoralisation... Je partage totalement ce genre de billet coup de gueule.